Agences de voyages indépendantes
Question écrite n° 19407 du 10/12/2020
Mme Annick Billon attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie sur la situation économique des agences de voyages indépendantes. Depuis mars 2020, les agences de voyages sont à l'arrêt. Les professionnels du secteur sont cantonnés à reporter ou rembourser le voyage de leurs clients. Plusieurs mesures avaient été prises afin de protéger le secteur du tourisme et ses salariés mais ces dernières ne suffiront pas pour faire face à la situation catastrophique qui est appelée à durer. L'ordonnance n° 2020-315 du 25 mars 2020 relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables ou de force majeure leur permet effectivement de déroger à la règle du remboursement et de proposer un avoir valable 18 mois, mais, passé ce délai, les clients devront être remboursés.
Or, la situation sanitaire demeurant inquiétante, les agences de voyages, qui ont très peu d'entrées d'argent et toujours des charges, redoutent cette échéance, qui pourrait conduire à de nombreuses fermetures et à des licenciements en masse. En raison des incertitudes concernant l'évolution de la pandémie de la Covid-19, il est fondamental que les professionnels de ce secteur soient accompagnés de manière durable et pérenne. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement entend aider financièrement les agences de voyages indépendantes dans les mois à venir afin de maintenir à flot le secteur d'activité.
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance
publiée dans le JO Sénat du 21/01/2021 - page 423
Les agences de voyages et les voyagistes font effectivement partie des secteurs les plus touchés par la crise. L'administration est actuellement en train de se concerter avec les représentants des agences de voyages pour étudier différentes pistes nouvelles, non seulement pour soutenir cette activité tant que l'activité touristique est au point mort, mais aussi pour accompagner la reprise quand elle interviendra. Les domaines actuellement discutés concernent, notamment, la formation, la communication, le développement du numérique, l'utilisation de l'open data et la transition vers un tourisme plus durable. En attendant l'aboutissement de ces nouveaux travaux, il convient de rappeler l'ampleur de l'implication du Gouvernement depuis le début de la crise. Conscient que le tourisme constitue un des secteurs les plus précocement et les plus durement touchés par la crise, le Gouvernement a en effet pris différentes mesures, et ce, de façon très rapide. Certaines mesures sont complètement spécifiques au tourisme, et concernent notamment les agences de voyages, certaines amplifient, pour ce secteur, des mesures générales décidées pour l'ensemble de l'économie. Certaines décisions ont été prises dès mars ; d'autres mesures ont connu plusieurs approfondissements au fil du déroulement de la crise sanitaire. Pour rappel, un plan tourisme a été annoncé lors du comité interministériel du tourisme (CIT) du 14 mai 2020. Le tourisme était le premier secteur de l'économie faisant l'objet d'un tel soutien spécifique. Un autre CIT s'est également tenu le 12 octobre 2020. 1. La première mesure spécifique, il faut le rappeler, a consisté dans la prise de l'ordonnance dite « avoirs » du 25 mars 2020 ; cette ordonnance a particulièrement concerné les agences de voyages. La profession a en effet subi un arrêt de son activité dès avant le confinement, du fait de la fermeture de nombreuses destinations étrangères. La profession n'aurait pas été en mesure de procéder à des remboursements simultanés. L'ordonnance 2020-315 du 25 mars 2020 a permis aux agences de voyages et aux voyagistes de ne pas rembourser les prestations annulées dans les délais habituels et de fournir aux clients des avoirs qui ne peuvent pas être remboursés avant 18 mois, avoirs valables pour des prestations équivalentes. Non seulement cette mesure a été nécessaire aux agences de voyages mais aussi elle a été proportionnée à la crise. Selon les estimations, le montant total des avoirs émis avoisinerait le milliard d'euros. Cette mesure a donc évité à la profession de se heurter à un mur de trésorerie. 2. D'autres mesures de soutien spécifiques ont été mises en place pour le tourisme. Elles sont importantes et ont été renforcées au cours du temps. Conformément aux annonces faites lors du CIT (conseil interministériel du tourisme) du 14 mai 2020, les entreprises des secteurs du voyage, de l'hôtellerie, restauration, cafés, tourisme, événementiel, sport, culture… ont bénéficié de mesures renforcées par rapport au reste de l'économie. Ces mesures ont encore été amplifiées par le CIT du 12 octobre, CIT, qui a décidé l'élargissement du périmètre (concrètement, des listes dites S1 et S1bis) des entreprises bénéficiaires du plan tourisme. Pour rappel, les agences de voyages et les voyagistes figurent parmi la liste S1. Voici le rappel des principales mesures : 2. 1. La prise en charge à 100 % de l'indemnité d'activité partielle pour les heures non travaillées a de nouveau été prolongée jusqu'à fin décembre 2020. Pendant les premiers mois de la crise, les employeurs ont bénéficié d‘une prise en charge à 100 % de l'indemnité versée à leurs salariés (zéro reste à charge). Depuis le 1er juin 2020, l'allocation compensatoire versée à l'employeur est passée à 85 % du montant de l'indemnité versée par l'employeur au salarié, soit 60 % du salaire brut au lieu des 70 % avant. Cependant, les entreprises des secteurs les plus touchés dits S1 et S1bis (tourisme, hôtellerie, restauration, sport, culture, loisirs et évènementiel) ont bénéficié du prolongement de la prise en charge à 100 % de l'activité partielle par l'État jusqu'au 31 décembre 2020, soit 100 % du salaire net pour les salariés au SMIC et 84 % environ du net (70 % du brut) dans la limite de 4,5 SMIC. 2. 2. Accès des petites et moyennes entreprises (PME) au fonds de solidarité, avec un accès élargi aux entreprises de ces secteurs. Le fonds de solidarité mis en place par le Gouvernement pour aider les entreprises a été progressivement renforcé. Initialement, le fonds de solidarité s'adressait aux entreprises ayant un effectif inférieur ou égal à 10 salariés, un chiffre d'affaires sur le dernier exercice clos inférieur à 1 million d'euros et un bénéfice imposable inférieur à 60 000 euros. Le montant de l'aide versée au titre du volet 1 pouvait atteindre jusqu'à 1500 euros par mois. L'aide versée est exonérée d'impôt sur les sociétés, sur le revenu et de toutes les cotisations sociales d'origine légale ou conventionnelle. Après plusieurs évolutions tenant compte de l'évolution de la crise sanitaire et de son impact sur les entreprises, le fonds de solidarité a été ouvert aux entreprises de moins de 50 salariés administrativement fermées sans condition de chiffre d'affaires (CA) ni de bénéfice. Le fonds de solidarité a également été ouvert aux filiales des holdings, à condition que l'effectif cumulé de la ou des filiales et de la holding soit inférieur à 50 salariés. À compter des pertes du mois de novembre, les entreprises fermées administrativement et les entreprises restant ouvertes des secteurs S1/S1bis qui ont une perte de CA de plus de 50 % peuvent recevoir une indemnisation mensuelle des pertes de leur CA allant jusqu'à 10 000 euros. Comme annoncé par le Président de la République et le Premier ministre, à compter du mois de décembre, le fonds de solidarité est rénové : pour les entreprises fermées administrativement (dont ne font pas partie les agences de voyages), l'aide mensuelle est soit forfaitaire, soit représenter 20 % du CA ; pour les entreprises affectées par les restrictions sanitaires et non soumises à une fermeture administrative, ce qui concerne le secteur S1, donc les agences de voyages et les voyagistes, le dispositif précédemment décrit estégalement ouvert, mais avec une modulation du taux de prise en charge. Ce fonds permettra ainsi, pour le mois de décembre 2020, au choix de l'entreprise de couvrir la perte de CA constatée soit par une aide forfaitaire d'un montant maximal de 10 000 €, soit une aide représentant 15 % du chiffre d'affaires (entre 50 et 70 % de perte de CA), soit une aide de 20 % (au-delà de 70 % de perte de CA, ce qui est le cas de la plupart des agences de voyages). Cette option est ouverte sans critère de taille dans un plafond d'aide maximale de 200 000€ par entreprise. 2. 3. Report et exonération de cotisations patronales pour les très petites entreprises (TPE) et les PME de ces secteurs. En réponse aux effets de la crise sanitaire, des dispositifs de reports d'échéances sociales et fiscales ont apporté un soutien immédiat à la trésorerie des entreprises. Ainsi, les entreprises ont pu massivement bénéficier d'un report de leurs échéances fiscales. Il a aussi été décidé qu'une exonération de cotisations sociales patronales de mars à juin 2020 s'appliquerait aux TPE et aux PME des secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, de la culture, de l'événementiel, du sport, du transport aérien et aux TPE ayant été frappées d'une interdiction d'accueil du public. L'exonération a vocation à s'appliquer automatiquement à toutes ces entreprises, qu'elles aient déjà acquitté ou non leurs cotisations. Aux exonérations de cotisations patronales s'ajoute un crédit de cotisation imputable sur l'ensemble des cotisations dues par l'entreprise. Il s'agit en l'occurrence d'un "crédit de cotisation" égal à 20 % des salaires versés depuis février. En pratique, la mesure équivaut à une baisse de 20 % des cotisations sociales sur la quasi-totalité de l'année 2020. La loi de finances rectificative n° 3 prévoit ainsi une mesure d'exonération de cotisations et contributions sociales patronales, associée à un crédit de cotisations, pour près de 3 Mds€. Ces deux dispositifs de réduction et d'exonération ont été réactivés et renforcés dans le cadre de la mise en œuvre tout d'abord d'un couvre-feu dans certains territoires puis du reconfinement, pour une application dès le mois de septembre 2020. Ainsi, les entreprises des secteurs dits S1 et S1bis (tourisme, restauration, culture, évènementiel, sport, loisirs) jusqu'à 250 salariés ayant subi une perte de CA à 50 % et les entreprises fermées administrativement jusqu'à 50 salariés bénéficient d'un dispositif d'exonération des cotisations sociales patronales, hors retraite complémentaire complétée par une aide au paiement des cotisations sociales de 20 % de la masse salariale pour les employeurs. Les professionnels sont également concernés par la possibilité d'étaler, sur une durée pouvant atteindre 3 ans, le paiement de leurs impôts dus pendant la période de crise sanitaire, sans condition de secteur d'activité ou de perte de CA. 2. 4. Un prêt garanti par l'État. L'offre de prêts garantis par l'État (PGE) a été renforcée sous la forme d'un « prêt garanti par l'État Saison » (PGES), ouvert aux secteurs liés au tourisme, de l'hôtellerie, de la restauration, de l'évènementiel, du sport, du loisir et de la culture, car ce sont des secteurs dont l'activité est très saisonnière. Les conditions sont plus favorables que le PGE classique avec un plafond plus élevé. Le PGE normal est plafonné à 25 % du CA (dernier exercice clos). Le plafond du « PGE saison » est calculé comme la somme des 3 meilleurs mois du dernier exercice clos (jusqu'à 80 % du chiffre d'affaires pour une entreprise très saisonnière). L'offre de PGE a été renforcée. Toutes les entreprises peuvent contracter un PGE jusqu'au 30 juin 2021 au lieu de la précédente date limite fixée au 31 décembre 2020. L'amortissement du prêt garanti par l'État pourra être étalé entre une et cinq années supplémentaires, avec des taux pour les PME négociés avec les banques françaises compris entre 1 et 2,5 %, garantie de l'État comprise. Les entreprises qui le souhaitent pourront demander un nouveau différé de remboursement du capital d'un an, soit deux années au total de différé. Les entreprises en grande difficulté qui n'auraient pas accès au PGE peuvent aussi bénéficier d'un prêt directement accordé par l'État (fonds de développement économique et social (FDES), les prêts bonifiés, les avances remboursables et les prêts participatifs) jusqu'au 30 juin 2021. 2. 5. Un crédit d'impôt pour inciter les bailleurs à annuler une partie de leur loyer. Ce crédit d'impôt, inscrit dans le projet de loi de finances pour 2021, vise à inciter les bailleurs à annuler une partie des loyers dus par leurs entreprises locataires qui sont administrativement fermées ou particulièrement affectées par les restrictions sanitaires mises en œuvre. Tous les bailleurs y seront éligibles, personnes physiques ou personnes morales, quel que soit leur régime fiscal. Le dispositif, qui concernera en premier lieu les loyers du mois de novembre 2020, se traduit pour les bailleurs d'entreprises de moins de 250 salariés, par un crédit d'impôt de 50 % des sommes abandonnées. Pour les bailleurs d'entreprises de 250 à 5 000 salariés, le crédit d'impôt se traduit par un crédit d'impôt de 50 % des sommes abandonnées, dans la limite des deux tiers du montant du loyer. Ainsi, le Gouvernement s'est montré à l'écoute des agences de voyages et soucieux de leur activité très réduite. Pour information, une mise à jour des aides prévues pour l'ensemble de l'économie est faite à l'adresse suivante : https://www.economie.gouv.fr/covid19-soutien-entreprises.