Développement d'une agriculture durable sur les petits territoires insulaires
Question écrite n° 13696 du 09/01/2020
Mme Annick Billon attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la difficulté de pratiquer une activité agricole sur les petites îles de la façade atlantique.
Le maintien et le développement durable de l'agriculture sont indispensables à la construction de territoires insulaires vivants, autonomes et résilients face aux enjeux d'aujourd'hui. Une agriculture diversifiée, innovante et cohérente apporte des solutions en termes de biodiversité, de préservation de l'environnement, de vitalité économique…
Les espaces insulaires et littoraux sont soumis aux mêmes réglementations environnementales, paysagères et de planification. Or, ce qui est possible sur le continent n'est pas envisageable sur des petites îles car leur exiguïté les soumet à l'application simultanée de différentes lois (loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 dite loi littoral, loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 dite loi ELAN, loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 dite loi EGALIM, code de l'urbanisme) qui peuvent s'avérer, dans certains cas, paradoxales. Ces contraintes rendent ainsi impossible l'installation de tunnels maraîchers sur les îles d'Arz ou de Bréhat en raison de la loi littoral, l'installation d'un élevage de poules pondeuses sur l'île d'Yeu en raison de la protection des espaces remarquables.
Aussi, elle lui demande dans quelle mesure il est possible d'envisager l'adaptation de certains textes de loi aux contraintes des petites îles afin de permettre le maintien et le développement d'une activité agricole respectueuse de l'environnement.
Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation
publiée dans le JO Sénat du 05/03/2020 - page 1146
La loi littoral du 3 janvier 1986, a posé des principes généraux pour une politique d'aménagement et d'urbanisme du littoral devant combiner protection de l'environnement, aménagement et développement des activités économiques liés à la mer. Le maintien des activités agricoles dans les communes littorales est une préoccupation de longue date. À cet égard, la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole a prévu une dérogation au principe de l'extension de l'urbanisation en continuité avec les zones urbanisées pour les activités agricoles ou forestières (article L. 121-10 du code de l'urbanisme). L'article 43 de la loi du 23 novembre 2018 n° 2018-1021 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique est venu assouplir cette dérogation à deux titres : d'une part, en supprimant le critère de l'incompatibilité de l'activité agricole avec le voisinage ; d'autre part, en élargissant la dérogation aux constructions et installations nécessaires aux cultures marines, y compris si celles-ci sont situées dans les espaces proches du rivage. La nouvelle rédaction de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme devrait donc faciliter désormais l'implantation de constructions et installations agricoles, forestières ou de culture marines dans ces zones côtières. Afin de prévenir le risque de dérives, les parlementaires ont souhaité que la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricole et forestiers soit saisie pour avis, en plus de la consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Le changement de destination de ces installations et constructions est en outre interdit. Les territoires insulaires sont particulièrement concernés par la loi littoral dans la mesure où le pourcentage de terrains constructibles y est réduit, notamment en raison de protections environnementales renforcées (sites classés, espaces remarquables du littoral, proximité du rivage…). Toutefois, il n'apparaît pas souhaitable de prévoir des adaptations spécifiques à ces petites îles, au-delà des cas de dérogations existants, au risque de fragiliser les principes fondamentaux de la loi littoral, qui reste un dispositif essentiel et adapté pour promouvoir l'aménagement intégré des zones côtières et le développement durable. Le dialogue avec les élus concernés est la voie à encourager pour trouver des solutions d'implantation et de développement de l'agriculture, qui permettent de concilier les différents enjeux de ces territoires.
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