AU SENAT
Accord bilatéral de sécurité France - Ukraine
Mercredi 13 mars, un débat, suivi d’un vote (consultatif), s’est tenu sur l’accord bilatéral de sécurité signé le 16 février dernier entre les présidents Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky. Par cet accord, qui fait suite à la déclaration de soutien à l’Ukraine des pays du G7 le 12 juillet 2023, la France s’engage, pour une durée de 10 ans, notamment à :
- la fourniture d'une assistance globale à l'Ukraine pour la protection et le rétablissement de son intégrité territoriale dans ses frontières internationalement reconnues (frontières de 1991), ainsi que pour le relèvement économique et la reconstruction ;
- la prévention, la dissuasion active et les mesures à prendre face à toute nouvelle agression de la part de la Fédération de Russie ;
- le soutien à l'intégration de l'Ukraine dans les institutions européennes et euro- atlantiques, notamment en soutenant l'adhésion de l'Ukraine à l'UE et l'interopérabilité avec l'OTAN.
Le fonds bilatéral d'aide à la sécurité et à la défense de l'Ukraine, en coordination avec la Facilité européenne de paix[1], permettra de soutenir ces efforts de coopération dans les domaines concernés.
Environ 25 pays ont approuvé la déclaration commune des participants au G7, et plusieurs pays ont d’ores et déjà signé des accords bilatéraux avec l‘Ukraine, notamment l’Italie, le Canada, le Royaume-Uni ou encore l’Allemagne.
Les Participants s'efforceront de faire en sorte que les capacités militaires de l'Ukraine soient d'un niveau tel qu'en cas d'agression militaire extérieure contre la France, l'Ukraine soit en mesure de fournir une assistance militaire efficace. Les modalités, le format et la portée de cette assistance seront déterminés par les Participants.
À l’issue du débat, le Sénat a voté en faveur de l’accord (293 pour, 22 contre)
Détails de l’Accord Bilatéral de Sécurité
Coopération dans le domaine de la Sécurité
Le participant français fournira assistance militaire et civile pour permettre à l’Ukraine de défendre sa souveraineté, son indépendance et son intégrité territoriale. Il contribuera à renforcer les capacités militaires, la résilience et la stabilité économique de l’Ukraine.
En matière de communication stratégique et la manipulation de l’information
Les Participants collaboreront pour améliorer les capacités de l'Ukraine à contrer l'ingérence étrangère et les manipulations de l'information, principalement la propagande.
Le Participant français aidera l'Ukraine à rejoindre les instruments collectifs de lutte contre l'ingérence étrangère et la manipulation de l'information.
Dans le domaine de la cybersécurité :
Les participants travailleront ensemble à permettre à l'Ukraine de détecter, dissuader et perturber toute agression cybernétique, tout cyber espionnage, notamment en renforçant la résilience cybernétique et la protection des infrastructures essentielles contre les cyberattaques en fournissant une assistance technique internationale à l'Ukraine.
Protection des infrastructures critiques :
Le Participant français contribuera au développement des capacités de protection des infrastructures critiques de l'Ukraine, y compris par des moyens militaires, en donnant la priorité, sans s'y limiter, aux capacités modernes de défense aérienne.
Coopération en matière de renseignement et de contre-espionnage :
Les Participants poursuivront et s'efforceront d'approfondir leur coopération dans le domaine du renseignement et du contre-espionnage conformément au cadre défini par les accords bilatéraux.
Lutte contre la grande criminalité :
Pour contrer les activités du crime organisé, les Participants prendront des mesures pour :
- mener des opérations conjointes pour détecter et supprimer la GCO (grande criminalité organisée) ;
- analyser la situation criminelle dans les pays et identifier les principaux risques liés à la GCO ;
- identifier et tracer les dividendes et les instruments du crime organisé en vue d’en faciliter la saisie et, le cas échéant, la confiscation ;
- créer des groupes de travail et des équipes d'enquête conjoints composés de procureurs et d'autres parties, en fonction des besoins identifiés ;
- faciliter l'offre de formation et le partage des meilleures pratiques.
Coopération en cas d’agression armée future :
En cas de future agression armée russe contre l'Ukraine, à la demande de l'un ou l'autre des Participants, les Participants mèneront des consultations dans les 24 heures pour déterminer les mesures nécessaires pour contrer ou dissuader l'agression.
Le Participant français fournira à l'Ukraine une assistance rapide et soutenue en matière de sécurité, des équipements militaires modernes dans tous les domaines, selon les besoins, et une assistance économique.
Coopération dans l’industrie militaire et de défense :
Coopération militaire et de défense :
Les Participants travailleront ensemble et avec d'autres partenaires de l'Ukraine à faire en sorte que les forces de défense et de sécurité ukrainiennes soient en mesure de rétablir pleinement l'intégrité territoriale de l'Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues depuis 1991.
Le Participant français aidera l'Ukraine à préserver ses capacités qualitatives militaires et de défense.
Les Participants proposent d'établir une coopération permettant au Participant ukrainien de développer des capacités militaires complètes dans les domaines suivants, qui ne sont pas exhaustifs :
- Équipements militaires,
- formation des forces ukrainiennes de défense et de sécurité,
- Soutien initial et soutien au lancement de la maintenance par les fabricants,
- Soutien structurel à la réforme du secteur de la défense,
- Soutien aux initiatives de cyberdéfense et de résilience,
- Assistance au système ukrainien de soutien médical pour le traitement et la réadaptation des militaires ukrainiens,
- Soutien au développement des forces de défense et de sécurité ukrainiennes,
- Soutien à la protection et à la défense des frontières, au génie et à la fortification, à la surveillance, au suivi des mouvements de troupes ennemies, à la reconstruction des infrastructures frontalières après la guerre, au déminage et à l'élimination des munitions non explosées.
Coopération dans le domaine de l’industrie de la défense :
Les participants s’efforceront de promouvoir la coopération entre leurs industries de défense et de renforcer la normalisation et l'interopérabilité de leurs équipements de défense.
Le Participant français contribuera au développement de la base industrielle de défense de l'Ukraine, notamment par le biais d'investissements français, de la localisation de la production en Ukraine et de la production conjointe pour la fabrication d'armes et de munitions prioritaires. Il travaillera avec l'Ukraine pour identifier les sources de financement nécessaires pour permettre le développement de la base industrielle de défense de l'Ukraine.
Les Participants favoriseront l'échange d'informations sur leurs efforts respectifs de recherche et de développement en matière de défense afin de mettre en œuvre des projets et des programmes conjoints visant à développer de nouveaux armements et équipements.
Le Participant français soutiendra les efforts de l'Ukraine pour intégrer son industrie de défense dans les cadres de défense et de sécurité de l'OTAN et de l'UE.
Coopération dans le domaine civil :
Assistance humanitaire
Le Participant français poursuivra son assistance humanitaire pour répondre aux besoins immédiats de la population ukrainienne face à l'agression armée de la Fédération de Russie.
Le Participant français s'efforcera de poursuivre dans la durée le soutien en cours à l’Ukraine, notamment dans les secteurs des transports, de l'énergie, de l'agriculture, de l'eau, du déminage humanitaire, des infrastructures critiques, du numérique, du logement et de la santé.
Soutien au programme de réforme de l’Ukraine :
Le Participant français se félicite de la décision d'ouvrir des négociations d'adhésion avec l'Ukraine et salue les progrès substantiels accomplis par l'Ukraine pour atteindre les objectifs qui sous-tendent le processus d'adhésion à l’UE.
Le Participant ukrainien s'efforcera de poursuivre son ambitieux programme de réformes, en particulier dans le cadre de son processus d'adhésion à l'Union européenne, afin de satisfaire aux obligations requises pour l'adhésion à l'UE.
Le Participant français réaffirme son intention de soutenir pleinement l'objectif d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne.
Relèvement et reconstruction de l’Ukraine :
Le Participant français s'efforcera de continuer à favoriser l'implication des entreprises privées, des collectivités locales et des organisations non gouvernementales dans le processus de reconstruction, dans le prolongement des actions initiées lors de la Conférence pour la résilience et la reconstruction de l'Ukraine qui a été organisée à Paris le 13 décembre 2022.
Les Participants reconnaissent la nécessité d'unir les efforts visant à protéger la population et les territoires de l'Ukraine des conséquences négatives causées par les mines et les engins explosifs non détonés.
À cette fin, le Participant français utilisera les outils bilatéraux appropriés, en bonne coordination et en optimisant autant que possible l'effet de levier avec les fonds européens et privés, y compris dans le cadre de la Facilité Ukraine de l'Union européenne qui vise à préparer l'Ukraine à une future adhésion à l'Union en soutenant son processus d'adhésion.
Le Participant ukrainien poursuivra la mise en œuvre de toutes les réformes requises dans le cadre de son processus d'adhésion à l'Union européenne et du plan ukrainien.
Indemnisation des pertes, préjudices et dommages causés par l’agression russe
Les Participants réaffirment que la Fédération de Russie doit payer pour la reconstruction à long terme de l'Ukraine. Conformément au système juridique français, les actifs souverains russes relevant de la juridiction de la France restent immobilisés jusqu'à ce que la Fédération de Russie ait payé pour les dommages qu'elle a causés à l'Ukraine.
En priorité, les Participants continueront à travailler ensemble, avec les États du G7 et d'autres, à la mise en place d'un mécanisme d'indemnisation des dommages, pertes ou préjudices causés par l'agression de la Russie, comme le prévoit le statut du registre des dommages causés par l'agression de la Fédération de Russie contre l'Ukraine, adopté par la résolution du Comité des ministres du Conseil de l'Europe CM/Res(2023)
Sanctions :
Les Participants reconnaissent la valeur des sanctions pour restreindre l'accès de la Fédération de Russie et d'autres États agresseurs au financement, aux biens, à la technologie et aux services qu'ils utilisent dans leur agression, pour réduire les sources de revenus de la Russie et pour dissuader de futures agressions. Les Participants continueront d'œuvrer pour que le coût de l'agression de la Russie continue d'augmenter, notamment par le biais de sanctions et de contrôles des exportations.
Redevabilité :
Les Participants réaffirment leur engagement à tenir la Fédération de Russie pour responsable des pertes ou des dommages causés à des personnes et à des entités, ainsi qu'à l'État ukrainien, du fait des actes internationalement illicites qu'elle a commis en Ukraine ou contre l'Ukraine, y compris son agression en violation de la Charte des Nations Unies.
Les Participants réaffirment qu'il ne doit pas y avoir d'impunité pour les crimes de guerre et autres atrocités et que la Fédération de Russie doit en assumer la responsabilité juridique, notamment en réparant tout dommage causé par de tels actes, ce qui contribuera également à dissuader de futures agressions et à soutenir la résilience de l'Ukraine.
Les Participants poursuivront leur engagement au sein du "Groupe sur les options pour la création d'un tribunal sur le crime d'agression contre l'Ukraine".
[1] La FEP est un instrument hors budget visant à accroître la capacité de l'UE à prévenir les conflits, construire la paix et renforcer la sécurité internationale. Il permet également de financer des actions opérationnelles ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).