Le 3 avril, le Sénat a adopté les conclusions de la commission mixte paritaire de la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels.

La responsabilité civile peut se définir comme l’obligation de répondre du dommage causé à autrui et d’assumer les conséquences civiles qui en découlent par le biais de la réparation. Ce droit repose aujourd’hui pour l’essentiel sur cinq articles du code civil, datant de 1804, et qui sont demeurés pratiquement inchangés.

Selon l’auteure du texte, la députée Nicole Le Peih, les troubles anormaux du voisinage constituent un premier pan à adapter en raison des enjeux qu’ils suscitent. La responsabilité pour trouble anormal de voisinage ne résulte en effet pas de la loi, mais d’une création, dite prétorienne, des juges, en vertu du principe selon lequel "nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage". Il s’agit d’une responsabilité sans faute. C’est l’anormalité du trouble (bruit, odeurs, fumées et poussières, perte d’ensoleillement, perte d’une vue sur un paysage, animaux…) qui entraîne la responsabilité de l’auteur, peu importe qu’il n’ait pas voulu nuire à son voisin. Néanmoins, aux termes de l’article 113‑8 du code de la construction et de l’habitation, le trouble anormal de voisinage ne peut pas ouvrir droit à des réparations lorsque l’activité qui génère des nuisances préexiste à l’installation du plaignant, et qu’elle se poursuit dans des conditions normales, c’est‑à‑dire sans changement d’activité. 

Dans ce contexte, cette proposition de loi permet de poser les conditions d’un « vivre ensemble » équilibré. Ainsi, le texte vient d’abord introduire dans le code civil le principe de responsabilité fondée sur les troubles anormaux du voisinage, consacré par la jurisprudence, afin de garantir une application homogène sur l’ensemble du territoire national. Il pose ensuite une exception à ce principe tirée de la théorie de la préoccupation, en introduisant dans le code civil les conditions d’exception posées actuellement, à savoir : le respect de la législation en vigueur, une antériorité, ainsi que la poursuite de l’activité dans les mêmes conditions.

C’est ce principe, partagé par tous, qui est donc repris dans le texte proposé. Par ailleurs, cette disposition a également pour objectif de répondre aux préoccupations du monde rural. Elle tend en effet à limiter les conflits de voisinage entre les nouveaux habitants d’un territoire et les acteurs, notamment économiques, culturels ou encore touristiques, déjà établis sur celui‑ci.

Les apports du Sénat

À l’initiative de ma collègue du groupe Union Centriste Françoise Gatel, rapporteure du texte, la commission a prévu une cause exonératoire spécifique, insérée au sein du code rural et de la pêche maritime : dès lors qu’une exploitation agricole modifierait les conditions d’exercice de son activité pour mettre en conformité celles-ci aux lois et règlements, le trouble anormal en résultant ne serait pas susceptible d’engager la responsabilité de l’exploitant.

La loi a été promulguée le 15 avril 2024

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