Ce projet de loi de programmation militaire s'inscrit dans le cadre de la Revue nationale stratégique (RNS) rendue publique le 9 novembre 2022.

Le texte fixe les orientations de la politique de défense française pour les sept prochaines années (de 2024 à 2030) et les moyens qui lui sont consacrés. Ainsi, cela permet de concilier l’impératif constitutionnel de voter un budget annuel et la nécessité d’un engagement sur le long terme pour atteindre un certain modèle d’armée (investissements, mise au point et acquisition de systèmes d’armes).

La loi de programmation militaire (LPM) entend maintenir l’objectif de porter l’effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB à compter de 2025. Pour la période 2024-2030, elle prévoit une enveloppe pour l’armée française de 413,3 milliards d’euros ((400 milliards d’euros courants de crédits budgétaires pour la mission "défense" sur la période 2024‑2030, complétés par 13,3 milliards d'euros de ressources supplémentaires), soit une augmentation de 100 milliards en comparaison avec la précédente LPM.

Cet important effort financier doit servir à la transformation de l’armée française après une longue période d’austérité. L’objectif principal de cette LPM est de préparer la France au retour à un conflit de haute intensité, comme celui que connaît l’Ukraine actuellement. Les objectifs affichés du texte sont les suivants :

  • La modernisation de notre dissuasion nucléaire, via son développement technologique mais aussi au travers de la construction de 3 nouveaux sous-marins lanceurs d’engins (SNLE), de missiles nouvelle génération ou encore du futur porte-avion à propulsion nucléaire (le PANG) attendu pour 2038 ;
  • Le renforcement de l’industrie et de la production sur le sol français ou européen des éléments les plus nécessaires comme les munitions mais également une volonté de parier sur l’innovation avec une volonté de passer dans un modèle « d’économie de guerre » ;
  • Un renforcement important dans la présence en outre-mer, notamment dans l’indopacifique zone des futures conflictualités, une meilleure préparation opérationnelle des soldats mais également une montée en puissance de la réserve, appelée à doubler d’ici 2030 pour passer à 80 000 réservistes ;
  • Enfin, d’importants investissements dans le cyber, les renseignements, l’espace ou les fonds marins, autant de lieux sur lesquels les nouveaux conflits sont en préparation et dans lesquels la France entend pouvoir se défendre.

Au-delà de ces aspects financiers, le projet de loi comprend également de nombreuses dispositions normatives intéressant la défense nationale, concernant notamment le renforcement du lien entre la Nation et les armées, et les conditions de vie et de travail des personnels de la défense et de leurs familles.

La LPM comporte dans sa rédaction initiale 36 articles divisés en deux titres (d’abord les mesures financières, puis les diverses dispositions, elles-mêmes divisées en 6 chapitres). Après l’examen par l’AN, le texte comporte 38 articles.

Examen au Sénat

Plusieurs points de vigilance ont été identifiés :

  • Comme de nombreuses lois de programmation, cette LPM fait porter une part significative de l’effort budgétaire en fin de programmation (bosse budgétaire à partir de 2028) ;
  • L’inflation reste la grande inconnue et pèsera fortement sur l’exécution concrète de la programmation ;
  • Le projet est moins détaillé que la LPM 2018 (ex : montant global pour les munitions, pas d’informations sur les reports de charges,…). Cela aura notamment pour conséquence de rendre le contrôle parlementaire plus compliqué.

Lors de l’examen du texte en commission, le sénat a adopté 165 amendements. Ils se structurent autour de 4 axes (exceptés les amendements relatifs au rapport annexé) :

  1. La rectification de la trajectoire budgétaire : Le but de la commission a été de consolider la trajectoire budgétaire. Les marches annuelles ont été relevées d’environ 500 millions par an, tout en restant dans le cadre des 413 milliards d’euros. Plusieurs amendements viennent également sécuriser le budget du ministère.
  2. Le Parlement doit pouvoir exercer son pouvoir de contrôle de manière satisfaisante. La commission a donc demandé un certain nombre d’informations supplémentaires ; les ajustements annuels de programmation budgétaire, des précisons sur l’activité, l’entrainement, le maintien en condition opérationnelle (MCO) ou encore la Disponibilité Technique Opérationnelle (DTO).
  3. Un volet de consolidation de notre base industrielle et technologique de défense, élément fondamental de la souveraineté française. Pour cela, les sénateurs ont mis en place un livret d’épargne de souveraineté à destination des industriels de la défense et de leurs nombreux sous-traitants, qui sont régulièrement confrontés à des problèmes de financements.
  4. Enfin, un volet RH qui vise à renforcer l’attractivité de la filière ainsi que la réserve opérationnelle. Les moyens dédiés aux RH et au SSA doivent être accrus.

56 amendements ont été adoptés en séance.

Commission mixte paritaire conclusive

Lundi 10 juillet, La CMP est parvenue à un accord sur la principale demande du Sénat : une accélération de la trajectoire budgétaire sur les premières années de la programmation. D’ici 2027, ce sont 2,3 milliards d’euros supplémentaires qui seront inscrits au budget des armées. Cela permettra notamment de relancer la préparation opérationnelle, dans un moment de dégradation du contexte géopolitique. Au moment où la tension internationale ne cesse de grandir, nos armées pourront bénéficier de moyens accrus pour se préparer, s’entraîner et s’équiper. Dans cette version issue des travaux du Parlement, la LPM répond aux exigences du moment.

Le Sénat a également été entendu sur plusieurs demandes de renforcement des moyens de contrôle de l’action du Gouvernement :

  • Création d’une commission parlementaire d’évaluation de la politique d’exportation d’armements, composée de 3 députés et 3 Sénateurs ;
  • Amélioration de la visibilité sur les évolutions des commandes et livraisons de matériel ;
  • Extension du champ de la délégation parlementaire au renseignement (sujets d’actualité et dialogue avec la CNCTR).

Enfin, la CMP a souscrit à la volonté du Sénat d’apporter une première réponse au financement des entreprises de la défense. Le dispositif retenu prévoit l’affectation d’une partie des ressources collectées dans le cadre du livret A vers ces entreprises de la défense.

Consulter l’Essentiel de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense, de la Commission des Finances, de la Commission des Lois

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